Lettre à ma dermatologue
Toulon, le 25 octobre 2004
René
Servat
à
Madame P.,
Madame,
En
tant que très ancien client de votre cabinet, je suis compétent pour pouvoir
dénoncer la constante et progressive dégradation de la qualité de vos services.
J'ai d'abord regretté que vous cessiez de
faire par vous-même les exérèses (bien anodines) de baso cellulaire. L'intervention
faite par un chirurgien décuple le coût pour la Sécurité Sociale.
Ensuite, je n'ai pas du tout apprécié que
vous me recommandiez le chirurgien S., lequel me faisait payer une consultation
de 40 à 50 euros pour seulement me fixer la date de l'intervention sur son agenda.
J'ai trouvé exagéré que le dit S. me renvoie chez vous pour enlever des points
de suture et qu'à la différence d'une première fois, vous n'hésitiez plus à
me taxer, lors d'une seconde fois, du prix d'une nouvelle consultation.
J'ai appris depuis qu'enlever des points de suture est compris dans l'acte d'opération
et que S. ne m'adressait à vous, sans doute, que pour échange de bon procédé
(en espèces sonnantes).
Ca y est. Une goutte vient de faire déborder
le vase.
Je n'accepte pas que désormais, à la différence de ce que vous faisiez avant,
vous m'affubliez d'un K15 pour me débarrasser de verrues séborrhiques à l'azote.
Pour m'avoir prélevé 28.81 euros, je quitte votre clientèle.
Renseignement pris, l'azote n'est pas le pétrole et n'a pas subi la hausse des
cours de ce dernier.
Je vous quitte donc pour cause de grande
vénalité de votre part.
Je dois cependant vous remercier pour deux
choses.
Tout d'abord, vous m'avez permis par ce dernier débordement de quitter la catégorie
peu flatteuse des patients (c'est le vrai mot à employer) crédules et naïfs.
Ensuite, en cette période de grandes difficultés pour la Sécurité Sociale et
la politique de la Santé, vous me permettez (dans les dîners en ville) de raconter
une histoire véritablement édifiante, époustouflante et scandaleuse qui ne manque
pas d'intéresser mes amis, dont d'ailleurs beaucoup se trouvent exercer le même
métier que vous.
Salutations.
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13 février
2008.
Si je ne renie aucun des faits signalés plus haut, par contre j'absous
totalement la responsabilité de mon ancienne Dermato L., laquelle était
au demeurant très sympathique.
La pauvre "a pris" pour les mauvaises pratiques de la profession.
J'ai réalisé par la suite que tous les autres praticiens de la
spécialité agissaient de la même façon.
C'est la façon de déterminer les paiements qui s'est transformée
dans la profession au fil du temps, bien sûr au profit de qui vous devinez.
Le problème s'est donc déplacé.
Ce cas concret illustre la dérive générale de la Médecine
Libérale. Tous les moyens sont bons pour inventer de nouveaux mécanismes
lesquels, sous couvert de bonnes intentions, aboutissent à procurer de
nouveaux revenus aux médecins. Je pourrais en citer des dizaines. Fastidieux
et inutile. Exit Don Quichotte. Et que vive le déficit de la Sécurité
Sociale